Peinture Encaustique
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Définition et origine

Portrait d'homme. Peinture à l'encaustique sur bois. Portrait du Fayoum, iiie siècle. H. 37,5 cm. Staatliche Antikensammlungen, Munich. La peinture à l'encaustique ou peinture à la cire, utilisée depuis l'Antiquité, est une technique de peinture qui utilise des couleurs délayées dans de la cire fondue, c'est-à-dire utilisant la cire d'abeille comme liant. Cette pâte est employée à chaud. On utilise cette technique principalement en peinture sur bois. On en trouve une description dans Pline l'Ancien.
Hawara (100-110 apr. J.-C.), un des portraits du Fayoum, utilisant la peinture à la cire.

Ce terme a ensuite été utilisé au xixe siècle (1845) pour désigner un mélange de cire et d'essence de térébenthine qu'on utilisera pour entretenir et faire reluire les meubles, les parquets.
Le procédé, dit « peinture à l'encaustique », consistait à mettre sur des plaques métalliques chauffées des pains de cire mélangée à des pigments de différentes couleurs ; puis d'étaler avec un pinceau la cire prélevée sur l'une de ces plaques.
Cela servait à la fois à la décoration, mais probablement aussi à la protection.
La peinture à l'encaustique est un procédé qui semble avoir été mis au point par un peintre grec du IVème siècle av. J.-C. du nom de Lysippe ; celui-ci appose sur ses tableaux le mot egkaen, c'est-à-dire « brûlé ».
Pline l'attribue aussi au plus ancien peintre connu, à savoir Polygnote (490-426), et à ses contemporains Nicanor et Arcésilas, l'un et l'autre artistes de Paros.

Pline précise préalablement que :

« On ne sait pas au juste qui inventa la peinture en cire et à l'encaustique » (XXXV, 41).
« Quelques-uns en attribuent la découverte à Aristide » (XXXV, 36, 35), « et le perfectionnement à Praxitèle ».
On a cité aussi Aristide de Thèbes (ive siècle) ou Pausias (400-320) ; on parle de nombreux tableaux à l'encaustique réalisés par Pamphile d’Amphipolis sous le règne de Philippe II de Macédoine (360-336.
Certains historiens ont envisagé l'hypothèse que la peinture à l'encaustique aurait pu exister dans le monde mycénien ; mais on considère que c'est peu probable. Actuellement, on pense qu'il conviendrait de situer son invention entre le ve siècle et le vie siècle et son application en peinture au IVe siècle.
À l'époque byzantine, le procédé à l'encaustique servit surtout à réaliser des icônes religieuses. Pour obtenir des contrastes de couleurs, on mélangeait les pigments avec la cire. On le retrouve jusqu'au VIIIe siècle, date à laquelle on l'a remplacé par le procédé de la détrempe.
On trouve également le mot dans les Septantes, Macchabées, II, 3, 298

Actuellement, la peinture à l'encaustique utilise un procédé plus moderne de saponification de la cire, par exemple à l'essence de térébenthine. On crée ainsi un médium sous forme d'émulsion alcaline très stable, qui permet aussi bien de travailler les glacis et les voiles que d'utiliser son pouvoir couvrant.
Les possibilités de variations techniques, sa compatibilité avec les médiums modernes, font de la peinture à la cire l'une des plus souples et des plus durables de l'histoire de l'art.

philippe cognée, galerie Templon, Paris. Aujourd'hui, un peintre tel que Philippe Cognée utilise cette technique de la façon suivante :

il dispose au pinceau une peinture à l'encaustique, faite de cire d'abeille (ou juste de cire) et de pigments de couleur, sur la toile, puis recouvre ensuite celle-ci d'un film plastique sur lequel un fer à repasser chauffe la cire pour la liquéfier, étalant et déformant les formes. Cela a pour effet de créer un enfouissement trouble du sujet dans la matière. Le film plastique lorsqu'il est décollé produit à certains endroits des manques dus à l'arrachage de la couche picturale. L'image semble alors piégée sous une surface glacée.
Bruno Gripari utilise lui aussi la peinture à l'encaustique, mais à la manière initiale.
Paul Rinaldi emploie l'encaustique avec de l'acrylique, ainsi que l'artiste française Amélie Caussade

Confection de la peinture à la Cire


Portrait d'homme. Peinture à l'encaustique sur bois. Portrait du Fayoum, iiie siècle. H. 37,5 cm. Staatliche Antikensammlungen, Munich. Préparez les pigments

Le dosage est variable et fonction du poids de la cire. On retient pour le dosage maximum :

5 % pour les oxydes ;
10 % pour les terres et les ocres.
Déposez le pigment dans un récipient en verre, type pot de confiture avec couvercle et recouvrez-le d'essence de térébenthine sans remuer.
Fermez le pot et laissez le pigment « boire » l'essence une douzaine d'heures.
Versez une bonne cuillerée à soupe d'huile de lin incolore dans les pigments et remuez pour avoir un mélange sans grumeaux et homogène.

Préparez la peinture à la cire

La peinture à la cire est obtenue à partir d'un pain de cire d'abeille naturelle :

Laissez reposer le pain de cire à 20°C ou plus
Coupez en petits morceaux ou bien râpez un pain de cire de 305 g dans un récipient en verre pouvant résister à la chaleur.
Cette cire étant jaune à orangée, vous pouvez la blanchir en la laissant au soleil plusieurs jours après l'avoir râpée et mise dans une bouteille en verre.
Bon à savoir : plus la cire est en fins morceaux, plus elle fond rapidement.
Mettez le récipient dans une casserole d'eau bouillante, si possible en l'isolant du fond par un chiffon de coton ou de lin plié en deux ou en quatre.
Mettez la casserole sur une plaque électrique ou à induction et faites chauffer.
Conseil : évitez de faire fondre de la cire ou tout autre produit hautement inflammable sur le gaz qui fait une flamme.
Lorsque la cire est fondue, retirez la casserole du feu et versez les pigments en poudre à l'aide d'un petit tamis, en remuant au fur et à mesure que vous les ajoutez :
il ne doit pas y avoir de grumeaux.
Remettez le récipient dans la casserole d'eau bouillante pour bien lier la cire et les pigments.
Puis, hors du feu, versez peu à peu 50 cl d'essence de térébenthine en remuant.
Portez à nouveau la casserole d'eau à ébullition, déposez le pot de cire dedans et remuez.
Répétez l'opération jusqu'à ce que le mélange cire-essence soit homogène, toujours hors du feu et loin de toute flamme.
Laissez refroidir le mélange avant utilisation.

Conseil :
il est impossible de proposer un dosage précis des pigments ; néanmoins, il est recommandé de ne pas en mettre beaucoup
– environ 3 cuillerées à café pour 305 g de cire
– la saturation de la couleur étant assez rapide et variant selon le type de pigment.


Matériels de la peinture encaustique


Cire


Le pain de cire

Cette cire pure vendue en pain de 400 g est idéale pour

la fabrication de bougies,
la fabrication d'encaustique,
l'entretien des meubles et la protection du bois.

Pigments


Les pigments en poudre extra-fine constituent une promesse de vivacité de couleur et de sélection rigoureuse dans les pigments.
Les fabricants de couleurs offrent un nombre conséquent de pigments purs qualité extra-fine pour la préparation de couleurs.

Avec les pigments en poudre, l’artiste n’a qu’à choisir son liant :

gomme arabique (aquarelle),
huile (peinture à l’huile),
liant acrylique (peinture acrylique),
œuf (tempera à l’œuf)
cire (encaustique)
et il peut fabriquer lui-même sa peinture.

Medium


Le medium à l'encaustique

Les couleurs à l’encaustique se travaillent à chaud.
Le médium sert à fabriquer les couleurs à l’encaustique par addition de pigments, à allonger les couleurs pour obtenir des teintes transparentes, mais également à poser une couche préparatoire sur le support à peindre.
Placez le médium dans un récipient en métal non-ferreux, et laissez-le fondre sur une plaque chauffante (plancha). La température ne doit pas excéder 75°C.
Appliquez au pinceau sur votre support.
Les pinceaux se nettoient dans de la paraffine fondue.
En fin de séance, nettoyez le fond des récipients avec du papier essuie-tout pour enlever la cire, et laissez refroidir en dehors de la plancha.
Ce produit est fabriqué de manière artisanale.
Composition : cire d’abeille purifiée, résine dammar

Fabriqué soi même Le ratio peut varier, entre 1 part de résine pour 8 parts de cire, jusqu’à 1 part de résine pour 6 parts de cire. Plus on met de résine, plus le médium est dur et brillant.
On le trouve difficilement « tout prêt » dans nos régions, c’est pourquoi nous en donnons la recette.
Il suffit d’ajouter des pigments au médium pour obtenir les couleurs.
On peut également le teinter avec de la peinture à l’huile sans dépasser 25% de peinture pour 75% de médium sous peine d’obtenir une encaustique qui ne durci pas.

Nettoyage


Le nettoyage de vos pinceaux

Les couleurs à l’encaustique se travaillent à chaud et durcissent en séchant, sur les pinceaux aussi.
Après quelques semaines de travail intense, les brosses et pinceaux sont un peu fatigués !
Il n'est pas inapproprié de leur donner un petit bain et même un bain public !

Pour nettoyer vos pinceaux, il vous faut :

la plancha branchée
un bac de paraffine propre
beaucoup beaucoup de papier absorbant ou de chiffons de coton
un fond de White Spirit
encore du papier absorbant….
une casserole d’eau chaude sur le réchaud
du savon de Marseille
Laissez chauffer les pinceaux sur la plancha pour que les poils ramollissent
Essuyez le maximum de peinture sur du papier absorbant.
Rincez à la paraffine propre
Essuyez une seconde fois sur le papier absorbant.
Pour cette étape, je le pose directement sur la plancha. Cela évite à la paraffine de se figer trop vite.
Trempez quelques instants les pinceaux dans le white spirit
et essuyez-les sur… (devinez quoi ?)
Mouillez les pinceaux dans l’eau chaude et frottez-les sur le savon de Marseille,
attention, l’eau ne doit pas bouillir.
Rincez, et essuyez une dernière fois…

Lorsque tout le monde aura pris son bain, laissez refroidir l’eau :

les résidus de paraffine vont se figer, et vous pourrez les retirer avant de jeter l’eau sale.
Et voilà, des pinceaux tout propres et prêts à se faire encaustiquer à nouveau

Recipients


Des récipients en quantité

les ramequins en aluminium font l’affaire, à trouver au rayon ménage des grandes surfaces. Je prend aussi des barquettes de congélation pour les plus grandes quantités de couleur ou médium ainsi que pour la paraffine qui sert à nettoyer les pinceaux. Sinon, nettoyez et recyclez les boîtes de thon!

Chauffage


Les outils de chauffage

plancha, chauffe-plat, ou palette à encaustique munis d’un thermostat électrique. Pour plus de précision quant à la température je me suis procurée un simple thermomètre pour four, et depuis, mes encaustiques ne surchauffent plus!

dans la technique de l’encaustique, l’artiste doit fusionner les couches de cire avec un pistolet à air chaud (décapeur thermique), ou un petit chalumeau à gaz, ou un fer à encaustique. Les textures varient en fonction de l’outil que vous utilisez.

Les outils pour chauffer la cire :

de gauche à droite :
chalumeau à crème brûlée, lampe à souder, petit chalumeau, fer à encaustique, pistolet à air chaud.
il est tout à fait possible de fusionner les différentes couches de cire au soleil tout simplement….
Je vous entends ricaner là-haut en Belgique…
D’accord, ce n’est pas la méthode la plus facile à utiliser dans certaines régions ou à certaines saisons ! Laissez votre tableau exposé à plat sous le soleil exactement, et la fusion s’opère, sous surveillance bien entendu.
Idem avec des lampes qui chauffent bien, du genre de celles que l’on tente d’éliminer parce que ça consomme beaucoup d’électricité… à vous de voir !

Les fers à encaustique :

utilisés dans la technique dite « encaustic art », ces petits fers à repasser servent à appliquer de la cire colorée sur du papier en créant des motifs. On ne peut pas vraiment les utiliser pour fusionner les couches d’encaustique entre elles, car la chaleur dégagée est en contact direct avec la cire, et le mouvement entraîne celle-ci de manière difficilement contrôlable. La cire fond plutôt qu’elle ne fusionne, ce n’est pas l’effet recherché.

Je fusionne d’habitude au pistolet à air chaud (un décapeur thermique), ce qui techniquement donne de bons résultats :

les couches fusionnent correctement, et l’aspect de l’encaustique ne se modifie pas, hormis l’apparition de mini-bulles dans l’encaustique. C’est un aspect typique du matériau, qui s’accentue avec l’utilisation du pistolet.

J’utilise parfois le petit chalumeau bleu pour les travaux fins, ou pour obtenir des effets avec l’huile en bâton, mais je n’avais jamais vraiment utilisé la « lampe à souder ».

Le résultat de la fusion est très différent :

l’usage du chalumeau est assez radical :
il vaut mieux le laisser en mouvement et ne pas s’approcher de trop près. J’ai commencé à l’utiliser pour les fonds, afin d’obtenir une couche lisse, presque nivelée, et prête à recevoir des détails plus fins au pinceau ou un transfert d’image photocopiée (qui demande un fond bien préparé, le plus lisse possible afin de garder tous les détails).
La fusion finale avec ce chalumeau donne à l’encaustique une apparence d’émail brillant incomparable, et il semble qu’il provoque moins de « petits trous », de ceux dont on se dit qu’ils sont typiques de la cire.
En résumé, chaque outil a son utilité, et ils ne sont pas tout à fait interchangeables.
Le pistolet à air chaud à bien des avantages, celui notamment d’être moins dangereux à utiliser (attention aux brûlures provoquées par son embout contre la peau…).
Il convient dans la plupart des cas mais tend à provoquer des petits trous dans la matière.
Le chalumeau est plus facile à utiliser sur des grandes surfaces, son « rayon d’action » étant plus important. Il donne un aspect plus brillant à la cire fusionnée, et j’ai constaté que l’éclat est prolongé dans le temps.

Supports


Les supports

Les supports idéaux pour l’encaustique sont absorbants, rigides et résistants à la chaleur. Cela inclus le bois, l’isorel, le carton entoilé de lin ou de coton, le contreplaqué, la terre cuite, le métal, le papier aquarelle épais, le carton….
Il ne faut pas utiliser un gesso acrylique qui n’est pas assez absorbant. Faites des essais, et trouvez celui qui vous convient le mieux.
la colle à la caséine ou colle de peau par exemple.

Parmis les supports possibles, le plus courant est le bois. Toutes les sortes de bois, à condition qu’ils ne soient pas trop dur, comme par exemple les essences destinées aux extérieurs.
Le plus simple ? Le contreplaqué pour intérieur. Généralement en bois de peuplier, il est idéal.

Différents supports pour peindre à l’encaustique :

du contreplaqué, un châssis en bois du commerce,
du carton entoilé lin naturel.
Préparation du contreplaqué :
Vérifiez qu’il n’y a pas de défaut majeur (cloque, colle, trou…).
Poncez légèrement, enduisez de 2 couches de gesso à la colle de peau de lapin.
Si vous préférez un contreplaqué sur châssis, vous pouvez le fabriquer vous-même.

Le plâtre et les plaques de plâtre

recouvertes de papier (Placo™) sont de bons supports (quoi qu’un peu lourds) et ils nécessitent un encadrement en finition pour éviter que les bords ne s’effritent.
Préparation :
Les supports à base de plâtre ne nécessitent pas de gesso.
Passez deux couches de médium encaustique.

La terre cuite, la céramique biscuitée (sans émaillage).

Préparation : 1 couche de médium encaustique

Le métal oxydé

qui possède une bonne couche de rouille devient suffisamment absorbant.
Préparation :
Après avoir brossé les particules de rouille qui ne tiennent pas, couvrez intégralement (recto/verso) de médium encaustique pour éviter toute oxydation supplémentaire.
Pose du médium encaustique sur une plaque de métal rouillé
Pour enduire votre plaque de métal, chauffez-la et passez un bloc de médium sur la surface chaude.

Le papier léger,

comme le Wenzhou pour la calligraphie. On peut l’utiliser pour en faire des kakémonos à suspendre, ou des collages qui seront encadrés.
Idem pour du tissus en fibres naturelles
(coton, lin, chanvre…), mais il faut rester dans des dimensions raisonnables si on ne les maroufle pas sur un panneau rigide.
Préparation : aucune.

Et les toiles à peindre du commerce ?

En règle générale, je ne le conseille pas… pour deux raisons :
Le gesso :
La plus importante à mes yeux est que l’enduction, ou gesso, est à base de résine acrylique, peu absorbante. La première couche de cire que vous passerez ne pénètre pas dans la toile. La conséquence probable est le décollement du feuil d’encaustique, et un tableau qui au bout d’un certain temps risque d’avoir l’air d’être mangé par les mites.

La souplesse de la toile :
La seconde raison est que la toile peut se déformer surtout si le châssis n’est pas épais, et induire le même genre de problème : décollement, écaillage sur les bords… La couche d’encaustique (qui contient de la résine dammar) devient très dure et cassante avec le temps.

Il y a pourtant quelques possibilités pour peindre sur toile :
Les petits formats (max. 25 x 25 cm) :
ils ne subissent pas les mêmes contraintes que les grands châssis entoilés.
Poncez les avant usage, et ajoutez deux couches de gesso à la colle de peau.
Les toiles “naturelles” du commerce avec une enduction transparente légère.
Elle est plus absorbante que le gesso blanc.
On trouve aussi de la toile à peindre au mètre non apprêtée, à choisir de préférence en lin, sur laquelle vous pouvez appliquer un gesso à la colle de peau de lapin.
Le papier aquarelle marouflé :
Vous pouvez améliorer la porosité de votre surface en marouflant du papier aquarelle.
La toile à peindre marouflée :
Si c’est la texture particulière de la toile qui vous attire, il est également possible de maroufler de la toile vierge sur un contreplaqué. Selon les dimensions de votre support à peindre, il faudra ajouter un châssis au dos pour rigidifier l’ensemble.
Attention,
les cartons entoilés ne conviennent pas : ils se courbent sous l’effet de la tension provoquée par les couches d’encaustique.

L’encadrement :

Enfin, si vous encadrez votre tableau, plutôt dans une caisse américaine, il sera mieux protégé des aléas de l'usure des bords.